Affaire Alino Faso : Le gouvernement ivoirien refuse la thèse de la torture.

Dans une intervention télévisée très attendue, le procureur de la République près le tribunal de première instance d’Abidjan, Oumar Braman Koné, a vigoureusement démenti dimanche les allégations de mauvais traitements dans l’affaire d’Alino Faso, alors que la tension diplomatique entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso s’aggrave.

Alain Christophe Traoré, alias Alino Faso, décédé en détention le 24 juillet dernier, était poursuivi pour « complots contre l’autorité de l’État » et « espionnage », a rappelé le magistrat. Contrairement aux accusations de torture portées par Ouagadougou, le procureur a souligné que le détenu bénéficiait de conditions « quasiment privilégiées », avec un régime alimentaire adapté, l’accès à la télévision et une détention à l’école de gendarmerie « pour sa propre sécurité ».

Sur la question centrale des mauvais traitements, Oumar Braman Koné a été catégorique : « Non, ça n’engage que ceux-là, sinon l’enquête est assez claire là-dessus. » Il a également confirmé l’ouverture d’une information judiciaire pour établir les causes exactes de la mort, confiée au doyen des juges d’instruction.

Cette déclaration survient au cœur d’une crise diplomatique majeure. Le gouvernement burkinabè dénonce un « assassinat crapuleux » et reproche à Abidjan l’absence de communication officielle sur le décès, révélé trois jours plus tard sur les réseaux sociaux. Le ministre burkinabè des Affaires étrangères, Jean Marie Traoré, a convoqué la chargée d’affaires ivoirienne pour exiger des explications, tandis que Ouagadougou réclame le rapatriement immédiat du corps et la manifestation totale de la vérité.

Cette affaire fragilise un contexte régional déjà tendu, alors que le Burkina Faso, le Mali et le Niger ont quitté la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) pour former la Confédération des États du Sahel (AES). Ces événements minent les efforts de dialogue en cours entre l’AES et les institutions régionales, notamment l’UEMOA, où la Côte d’Ivoire joue un rôle central.

La défiance accrue entre Ouagadougou et Abidjan pourrait compromettre les négociations diplomatiques post-retrait et freiner la coopération régionale. Le gouvernement burkinabè affirme que « la mort d’Alino Faso ne restera pas impunie » et continuera à suivre le dossier « jusqu’à la manifestation totale de la vérité ».

Symbole pour de nombreux militants sahéliens, cette affaire cristallise les tensions entre souveraineté des États sahéliens et maintien des structures régionales traditionnelles. L’intervention du procureur ivoirien, rare prise de parole officielle, illustre la gravité et l’impact politique de ce dossier pour la stabilité ouest-africaine.

RCA : un ex-officier mis en examen et incarcéré en France

Son arrestation a eu lieu mardi dans la région de Besançon, dans l’est de la France. Eric Danboy Bagale a ensuite été mis en examen et écroué vendredi 18 septembre à Paris.

Eric Danboy Bagale, un ancien responsable de la garde présidentielle centrafricaine de François Bozizé et chef de milice anti-balaka, a été mis en examen et écroué vendredi soir à Paris, notamment pour actes de tortures et complicité de crimes de guerre et contre l’humanité.

L’ancien responsable de la garde présidentielle centrafricaine de François Bozizé et chef de milice anti-balaka, est notamment accusé d’actes de torture et complicité, complicité de crimes contre l’humanité, complicité de crimes de guerre et participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un crime ou d’un délit de guerre.

Les milices anti-balaka affrontaient les groupes armés de la Séléka. Les Nations Unies ont accusé les deux coalitions de crimes de guerre après les massacres qui ont plongé le pays dans la guerre civile.

« Eric Danboy était surtout un proche dans les services de sécurité de l’ex-président Bozizé. Et il a fui avec l’entourage de Bozizé lors du putsch de 2013 et il avait disparu un peu des radars depuis cette époque. On estime qu’il a probablement collaboré avec le mouvement anti-balaka qui avait attaqué Bangui en décembre 2013 », précise Thierry Vircoulon, coordinateur de l’Observatoire pour l’Afrique Centrale et Australe à l’Institut français des Relations internationales (Ifri).

Il lui est notamment reproché des actes commis entre 2007 et 2014 et était recherché dans le cadre d’une enquête ouverte en mai 2017 et désormais confiée à des juges d’instructions spécialisés du tribunal de Paris. Il s’agit de la première mise en examen dans une procédure diligentée par le PNAT (Parquet national antiterroriste) concernant des faits commis en République centrafricaine.

Arrivé en 2014 en France

Cet ancien de la garde présidentielle est arrivé en France en 2014 selon le Parquet national antiterroriste. Il a fui la Centrafrique avec les autres proches du président François Bozizé qui venait d’être chassé par un coup d’État. À l’époque, la France et Monaco avaient gelé les avoirs d’Eric Danboy Bagale et de Jean-Francis Bozizé, le fils de l’ancien président, les accusant d’oeuvrer « à la déstabilisation de la République centrafricaine » et de tenter « de commettre un acte de terrorisme ».

Ces dernières semaines, trois présumés responsables anti-balaka ont été arrêtés, dont deux en France « ce qui montre que beaucoup de membres de l’entourage de Bozizé circulent peut-être encore sur le territoire français », rajoute le chercheur Thierry Vircoulon.