Ci-dessous, l’intégralité du discours de Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l’UA, au Sommet extraordinaire et Conférence des donateurs de Malabo.
Excellence Monsieur Macky Sall, Président de la République du Sénégal et Président de l’Union africaine,
Excellence Monsieur Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, Président de la République de Guinée Equatoriale,
Excellences Messieurs les chefs d’Etat et de gouvernement,
Mesdames et Messieurs,
Après plusieurs reports, voici enfin que se tient cette importante session extraordinaire du Sommet humanitaire de l’Union africaine, couplée à la conférence des donateurs.
C’est un moment d’intense émotion eu égard à la fragilité existentielle de nos frères et sœurs pris au piège des déplacements forcés, de l’exil et de l’apatridie pour diverses raisons. Ils attendent avec anxiété et impatience que notre générosité et notre devoir d’humanité viennent apaiser leurs multiples souffrances.
Je voudrais remercier le Président de la République de Guinée Equatoriale, S.E. Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, pour la chaleur de l’accueil et pour la qualité des conditions dans lesquelles se déroulent nos réunions depuis notre arrivée à Malabo.
Je voudrais solennellement saluer le bilan élogieux des activités humanitaires qu’il a menées depuis 2019, année au cours de laquelle ses pairs l’ont investi de la lourde charge de Champion du thème de l’année, consacré aux réfugiés, aux rapatriés, aux personnes déplacées et à la recherche des solutions durables aux déplacements forcés en Afrique.
Je me réjouis et me félicite de la présence de nos chefs d’Etat et de gouvernement au premier rang desquelles, celle du président en exercice de l’UA. Ceci constitue assurément un témoignage éloquent du niveau d’attention accordée à la problématique humanitaire en Afrique.
Je salue la participation effective de Monsieur le secrétaire général des Nations unies à travers son représentant, Monsieur Martin Griffins.
A tous nos partenaires, traditionnels et nouveaux, à l’ensemble des participants, j’exprime ma gratitude pour leur présence et leur engagement actif que viendront bientôt attester leurs contributions financières.
Monsieur le Président de l’Union africaine,
Mesdames et Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement,
Les urgences humanitaires en Afrique, nombreuses, diversifiées et géographiquement dispersées, constituent un sujet permanent de préoccupation. Elles sont illustrées par des chiffres et des données statistiques élaborés et compilés par les agences spécialisées des Nations unies. Je vais me limiter aux tendances générales qui se dégagent dans les cinq régions du continent.
Dans les 15 Etats membres les plus affectés, 113 millions de personnes sont en attente d’assistance d’urgence en 2022.
L’Afrique de l’Est et la Corne de l’Afrique abritent actuellement 4,5 millions de réfugiés dont plus de 75% ont été affectés par la réduction de rations alimentaires en 2021. Ces deux dernières années, dans cette même région, les besoins alimentaires ont augmenté de 70%, et plus de 25 millions de personnes y sont en situation d’insécurité alimentaire.
En Afrique de l’Ouest et centrale, on compte 58 millions de personnes en situation d’insécurité alimentaire. Il s’agit là du niveau d’insécurité alimentaire le plus élevé depuis 2016. On dénombre deux millions de personnes déplacées internes en Afrique centrale. Ce chiffre représente une augmentation de 30% par rapport à l’année 2020, et ne prend pas en compte les cinq millions de déplacés du Bassin du Lac Tchad.
En Afrique du Nord, plus de 14 millions de personnes ont besoin d’assistance humanitaire.
Le tableau n’est pas reluisant. Loin s’en faut. Il est davantage assombri par deux facteurs: d’une part, l’anéantissement des efforts d’autonomisation des réfugiés par l’impact de la pandémie de la Covid-19, et d’autre part, la pression exercée sur la planète au nom de la quête de la croissance économique et dont les effets se traduisent en changements climatiques se manifestant par une sécheresse prolongée et des inondations incontrôlables.
Monsieur le Président de l’Union africaine,
Mesdames et Messieurs les Chefs d’Etat et de Gouvernement,
Face à ce nœud de difficultés, l’Union africaine a développé des instruments normatifs et opérationnels à l’effet d’améliorer les conditions de vie des réfugiés et des personnes déplacées internes sur le continent. Au niveau normatif, il faut mentionner, entre autres et principalement, la Convention de Kampala adoptée en 2009 et la Déclaration y relative qui précisent les objectifs et les modalités d’action en faveur des réfugiés et autres personnes forcées au déplacement. Au plan opérationnel, des plans régionaux pour gérer les crises liées aux réfugiés ont été mis en place. Depuis cinq ans, les fonds requis pour leur fonctionnement n’ont pu franchir la barre de 50%. La première conférence des donateurs, faut-il le rappeler, s’est tenue il y a 11 ans, en 2011.
Le paradoxe de l’humanitaire réside dans la divergence entre le caractère d’urgence lié aux situations de détresse humaine à prendre en charge et la poignante nécessité de différer cette prise en charge pour cause d’absence ou d’insuffisance de ressources financières.
Comment réduire au minimum ce douloureux écart ?
En organisant ce Sommet humanitaire extraordinaire suivi par la conférence des donateurs, l’Union africaine marque sa ferme détermination à poursuivre ses efforts en faveur de la réduction des souffrances dont sont victimes les réfugiés et les personnes déplacées internes sur le continent.
Je me félicite de ce que notre appel aux donateurs soit en phase avec les préoccupations exprimées par le Secrétaire Général de l’Organisation des Nations unies, Monsieur Antonio Guterres. Dans son Rapport publié en septembre 2021 intitulé Notre programme commun, celui-ci insiste, entre autres, sur la nécessité de ne laisser personne de côté.
Excellences, Mesdames Messieurs,
L’actualité a retenu, l’histoire retiendra, qu’en ce jour, dans cette belle cité de Malabo, les Chefs d’Etat et de Gouvernement d’Afrique ont, au cours de ce Sommet humanitaire extraordinaire de l’Union africaine, réaffirmé et confirmé, leur constante détermination à ne laisser de côté aucun réfugié ni aucun déplacé interne sur notre continent.
C’est sur cet engagement solennel que je voudrais vous souhaiter de fructueuses délibérations.
Je vous remercie de votre bienveillante attention.