Baporo, derrière les murs des pénitenciers, l’espoir germe en silence

Derrière les murs de Baporo, dans la province du Sanguié, la peine n’empêche pas la semence. Ce mercredi 16 juillet…

centre pénitentiaire agricole

Derrière les murs de Baporo, dans la province du Sanguié, la peine n’empêche pas la semence. Ce mercredi 16 juillet 2025, le soleil tapait fort sur les toits ondulés du centre pénitentiaire agricole. Pourtant, dans les champs tout autour, la vie poussait avec obstination. une mission du Bureau National des Grands Projets du Burkina (BN-GPB) foulait les allées encore humides d’irrigation. Objectif : constater de visu les fruits d’une ambition présidentielle.

 

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Une terre de privation devenue terre de production

Ici, les barbelés cohabitent avec les sillons. Les détenus, armés non pas de violence mais de bêches, ont vu leur quotidien transformé par l’Initiative Présidentielle pour la Production Agricole et l’Autosuffisance Alimentaire (IP-P3A). Ce programme a injecté des moyens inédits sur ce site pénitentiaire. Forages, bassins de rétention, systèmes d’irrigation par aspersion… Tout a été pensé pour faire de Baporo un véritable pôle agricole. Et ça fonctionne. Lors de la dernière campagne sèche, plus de 50 tonnes de récoltes ont été engrangées. Quinze tonnes de gombo, vingt de tomates, quinze d’oignons. Des chiffres qui parlent d’eux-mêmes.

 

Des mains coupables qui nourrissent

Ici, la rédemption prend la forme de lignes bien droites. Les détenus ne travaillent pas sous la contrainte, mais par devoir et par espoir. Ce qu’ils cultivent ne nourrit pas que les marchés ou les cantines des prisons. Il nourrit aussi leur dignité.

« J’ai appris à faire pousser des légumes ici. C’est dur, mais je sais que je sortirai avec un vrai savoir », murmure l’un d’eux, les yeux rivés sur une planche de tomates.

Ces terres, auparavant en friche, portent aujourd’hui les promesses d’une réinsertion par le travail, d’un avenir où la prison ne signifie plus immobilisme et punition sèche, mais contribution et apprentissage.

 

Une logique de production et d’autonomie

L’investissement du IP-P3A dans les maisons d’arrêt n’est pas anodin. Il s’inscrit dans une vision plus large : celle d’un Burkina autonome sur le plan alimentaire, même dans ses lieux les plus reclus.

À Baporo, on ne se contente pas de produire. On gère les cycles de l’eau, on planifie les cultures selon les saisons, on apprend à conserver les récoltes. La terre, ici, est école. L’agriculture devient un levier de transformation structurelle, même en milieu carcéral.

Et les résultats sont là. Les rendements rivalisent avec ceux de nombreuses exploitations civiles. L’irrigation fonctionne, les sols sont maîtrisés, l’organisation est millimétrée. Baporo, en silence, devient un modèle.

 

La visite des grands projets : un symbole fort

La présence du BN-GPB ce 16 juillet n’est pas qu’un simple contrôle administratif. C’est une reconnaissance. Une manière d’inscrire Baporo dans la cartographie des réussites rurales, malgré sa nature pénitentiaire. Les responsables du projet saluent une dynamique exemplaire. Ils évoquent la possibilité de dupliquer le modèle dans d’autres centres. Le lien est clair entre autosuffisance, réinsertion et justice sociale. Dans un contexte où le Burkina lutte contre l’insécurité alimentaire, chaque initiative compte. Et celle-ci, en plus de produire, transforme les individus.

 

Un cercle vertueux en devenir

Les cultures de Baporo ne sont pas vendues à perte. Elles approvisionnent les marchés locaux, mais aussi certaines structures étatiques. La logique est celle d’une économie circulaire : produire, consommer localement, réinvestir. Les détenus, en échange de leur travail, reçoivent des points de réduction de peine ou une petite rétribution, selon les cas. Mais surtout, ils repartent avec une formation. Certains parlent déjà de créer leur propre ferme, une fois libres. Les encadreurs agricoles du centre sont unanimes : « Ce que ces jeunes apprennent ici, ils ne l’auraient jamais appris ailleurs, et surtout pas dans les conditions de pauvreté qui les ont souvent conduits ici. »

 

La prison comme laboratoire social

À Baporo, on redéfinit la finalité même de l’incarcération. La punition laisse place à une vision réparatrice de la peine. Et c’est peut-être là le message le plus puissant de ce centre. Le site n’est plus un simple lieu d’enfermement. Il devient une cellule de production, un incubateur de compétences, un espace d’expérimentation pour un avenir plus juste. Dans les sillons retournés par les détenus se lisent des lignes d’espérance. Le Burkina, confronté à de multiples défis, explore ici une piste originale, audacieuse et prometteuse : réconcilier répression et production.

 

Des défis à relever, mais un cap tracé

Bien sûr, tout n’est pas parfait. Les équipements sont parfois vétustes. Les ressources humaines manquent. Le suivi des anciens détenus reste fragile. Mais l’élan est là. Avec l’accompagnement du BN-GPB et la volonté politique de généraliser l’IP-P3A, des centres comme celui de Baporo pourraient se multiplier. Et si demain, les prisons rurales devenaient des pôles agricoles à part entière ? Et si la réinsertion passait par la terre, la sueur, et les semences ?

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