Le Mali entre dans une nouvelle ère politique. Alors que le pays tourne définitivement la page de l’accord de paix d’Alger, les autorités de la Transition s’apprêtent à adopter une Charte nationale pour la paix et la réconciliation. Ce document majeur, fruit d’une longue réflexion politique, entend offrir un cadre souverain, adapté aux réalités du pays, pour bâtir une paix durable.
Le 26 mai 2025, le Premier ministre Abdoulaye Maïga a dirigé une réunion stratégique à la Primature avec la commission chargée de la rédaction de cette Charte. Objectif : peaufiner les derniers détails avant son adoption officielle prévue pour le 30 juin prochain.
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Lancée en juin 2024 sous l’impulsion du Président de la Transition, la commission présidée par l’ancien Premier ministre Ousmane Issoufi Maïga a connu un parcours semé d’embûches. Malgré des consultations nationales difficiles, les contributions citoyennes recueillies entre février et avril 2025 ont enrichi le texte, aujourd’hui structuré en 16 titres, 39 chapitres et 105 articles.
Une rupture assumée avec l’Accord d’Alger
En janvier 2024, le Mali avait déclaré l’accord d’Alger « caduc », rompant officiellement avec le processus soutenu par la communauté internationale. La nouvelle Charte se veut une réponse malienne, souveraine, et surtout libérée des influences extérieures. Un virage radical qui suscite à la fois espoir et inquiétude.
Car si le document met en avant des valeurs fortes comme le patriotisme, la cohésion sociale, la sécurité collective et la justice équitable, certains observateurs pointent l’absence de certains groupes armés dans les discussions. Un manque d’inclusivité qui pourrait fragiliser la portée réelle de la Charte sur le terrain.
Le texte entend également promouvoir une gouvernance transparente, la liberté de la presse et une lutte résolue contre la corruption. Fait notable, il mise sur les mécanismes traditionnels et locaux pour la prévention des conflits, marquant une volonté de recentrer les solutions au cœur des réalités maliennes.
Refondation politique ou centralisation du pouvoir ?
Cette dynamique s’inscrit dans un contexte de bouleversement profond. Le 13 mai 2025, tous les partis politiques et associations à caractère politique ont été dissous par décret présidentiel. Une décision inédite, justifiée par le besoin de « réorganiser l’espace politique », mais qui suscite de vives inquiétudes.
En parallèle, une nouvelle architecture législative est en cours d’élaboration. Elle vise à redessiner entièrement le paysage politique malien, en rupture totale avec le système précédent. Pour ses partisans, il s’agit d’un pas vers la stabilité et la cohésion. Pour ses détracteurs, cette refondation risque de consolider un pouvoir centralisé, au détriment du pluralisme et de la démocratie.
Le Premier ministre a néanmoins réaffirmé l’engagement du gouvernement à concrétiser les principes de la Charte sur le terrain. La route vers une paix durable est encore longue, mais le Mali, plus que jamais, semble décidé à la tracer seul, selon ses propres règles.

