Le Niger tourne la page du français : le haoussa érigé langue nationale dans la nouvelle charte

Niamey – La publication du décret portant promulgation de la charte de la refondation marque un tournant linguistique et politique…

Niamey – La publication du décret portant promulgation de la charte de la refondation marque un tournant linguistique et politique majeur au Niger. Entrée en vigueur fin mars, cette charte adoptée à l’issue des assises nationales de février 2025 remplace la Constitution suspendue depuis le coup d’État du 26 juillet 2023. L’article 12 du texte redéfinit les statuts linguistiques dans le pays et établit une rupture historique : le haoussa devient la langue nationale, tandis que le français est rétrogradé au rang de langue de travail.

Cette disposition, inédite dans l’histoire du pays, consacre le haoussa, la langue la plus parlée sur l’ensemble du territoire, comme langue principale. Elle écarte le français, utilisé jusque-là comme langue officielle mais parlé par seulement 13 % de la population. Le texte ne mentionne désormais aucune langue officielle, listant simplement les onze langues nationales reconnues, dont le zarma-songhaï, deuxième langue la plus répandue.

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Cette évolution intervient dans un contexte de tensions diplomatiques persistantes entre Niamey et Paris. Le mois dernier, le Niger annonçait son retrait de l’Organisation internationale de la Francophonie et procédait au changement de plusieurs noms de rues à Niamey, effaçant des références françaises au profit de figures locales.

Pour les autorités de transition, ce changement linguistique s’inscrit dans un processus plus large de refondation nationale. Le général Abdourahamane Tiani, président du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), a promulgué le texte lors d’une cérémonie officielle à Niamey, le 26 mars 2025.

Cependant, cette décision suscite aussi des inquiétudes. Sur les réseaux sociaux, plusieurs voix s’élèvent contre une possible hiérarchisation des langues, perçue comme un risque de marginalisation des communautés non haoussa. Dans l’ancienne Constitution, toutes les langues nationales bénéficiaient d’un statut égalitaire. La fin de cette égalité de principe suscite des débats au sein de la société nigérienne.

Enfin, cette réforme linguistique confirme l’orientation géopolitique du Niger, membre de la Confédération des États du Sahel (AES) aux côtés du Mali et du Burkina Faso. À travers cette mesure, Niamey entend affirmer sa souveraineté culturelle et renforcer son ancrage dans une dynamique régionale de rupture avec les anciennes puissances coloniales.

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